Mali, Mauritanie, deux raisons d’espérer pour le Sahel ?
Mali, Mauritanie, deux raisons d’espérer pour le Sahel ?
Les coups d’état traduisent souvent l’échec d’une classe politique à remplir convenablement sa mission et à se montrer à la hauteur des aspirations des populations. Un Pouvoir civil qui plonge son pays dans le chaos et la désolation ne saurait se prévaloir d’une quelconque légitimité pour être à l’abri éternellement. Surtout quand on connait la qualité des élections et le degré de leur traduction effective de l’expression réelle de la volonté des populations. Lorsque la classe politique et la société civile ne parviennent pas à faire entendre raison à un Pouvoir aveugle et condamné, l’Armée fait alors figure de dernier recours pour une mise en demeure susceptible de débloquer la situation par un acte citoyen qui ne saurait être assimilé à une volonté des militaires de prendre le pouvoir pour s’y éterniser. L’époque des régimes militaires étant désormais révolue.
Invoquer les mânes de la démocratie pour délégitimer la décision militaire de mettre fin à un mode de gouvernance marqué par une corruption et une gabegie caractérisées relève de l’indécence et de la pure hypocrisie. Cette corruption systémique engloutissant le peu de moyens dont dispose l'Etat, y compris au ministère de la Défense, alors même que le pays est confronté à une insécurité faisant des centaines de victimes parmi les militaires et les civils.
Le comportement du fils de l'ancien président étalant un train de vie outrancier a achevé de discréditer un pouvoir prédateur, aveuglé par le sentiment de toute-puissance et d’impunité que procurent argent et pouvoir.
Une fois de plus, l'Union africaine et la CEDEAO, ne réagissent que pour protéger des systèmes gangrenés qui n'hésitent pas à s'en prendre à leurs propres populations. La condamnation du coup d'Etat aurait été plus convaincante si elle avait été précédée de la même réprobation des errements du pouvoir à l'origine de la situation actuelle.
L’évolution de la situation malienne peut être rapprochée de l’actualité, certes moins médiatisée, en Mauritanie, où la justice demande des comptes à l’ancien président de la République sur sa gestion du pays pendant les deux mandats qu’il a effectués. Au-delà d’une éventuelle dimension "règlement des comptes" de cette affaire, elle pourrait néanmoins constituer un précédent prometteur au Sahel pour l'émergence d'une gouvernance plus attentive et respectueuse des intérêts fondamentaux des populations et des pays.
Ces deux événements, malien et mauritanien, pourraient être utiles aux autres pays souvent confrontés aux mêmes réalités.
Avant de se tourner vers la France et la communauté internationale et vouloir établir des partenariats efficients sur les questions de sécurité et de développement, les peuples du Sahel devraient redoubler d'exigence envers leurs propres classes politiques et se dresser contre leur propension à mettre le bien public au service d'intérêts particuliers.
Abdoulahi ATTAYOUB
@attayoub
Lyon le 19 août 2020