Niger : Le Président Bazoum maintenant aux commandes !
Niger : Le Président Bazoum maintenant aux commandes !
L'investiture du nouveau Président de la République Bazoum Mohamed vient de clôturer une longue période électorale qui a cristallisé toutes les attentions et connu des moments de tension avec leur lot d’excès et de retournements. Globalement, les autorités ont su garder le cap et maintenir des conditions de sécurité ayant permis un déroulement jugé convenable des différents scrutins, au regard de ce qui se passe ailleurs dans la sous-région. Les Nigériens ont fait preuve d’un attachement remarqué à la paix et à la stabilité au grand dam des incitateurs à la haine et au désordre.
Le pays entre maintenant dans une période marquée, dans un premier temps, par la volonté d’assurer la continuité des mandats précédents. Cette séquence s’estompera le moment venu et fera progressivement place à une nouvelle méthode et à une empreinte plus personnelle du Président Bazoum Mohamed sur l’appareil d’Etat et sa gouvernance. Cette phase de « transition » débute sous l’ombre du Président Mahamadou Issoufou, qui s'explique par la volonté du Président Bazoum Mohamed de se montrer fidèle à sa relation avec lui et par la complexité et le poids des réseaux issus d'une pratique politique installée depuis des années.
En effet, Bazoum Mohamed doit beaucoup à l’ancien Président de la République Mahamadou Issoufou. Ce dernier a fait le choix, pas forcément facile, de le soutenir et d'amener laborieusement le parti à accepter cette option au prix de quelques mouvements d'humeur qui ont atteint leur paroxysme avec la crise Hassoumi Massaoudou. L'alliance objective de Bazoum et Issoufou aura ainsi triomphé des autres agendas au sein du PNDS-TARAYA. Agendas qu'il s'agira de ménager au plus près pour conserver l'image d’unité reconstituée après la fronde de Hassoumi Massaoudou et les tiraillements qui ont failli compromettre les chances électorales ayant abouti aux résultats que nous connaissons. D’ailleurs, la place de choix de Hassoumi Massaoudou, dans la nouvelle équipe gouvernementale, illustre assez bien l'existence de ce « rapport de force » interne au parti.
Les grincements de dents et les innombrables désillusions consécutifs à l'annonce de ce premier gouvernement feront l'objet d'un traitement qui devra être rationalisé dans l'intérêt du pays pour commencer à asseoir un pouvoir en adéquation avec le pays réel plus qu'avec des convenances partisanes ou de complaisance.
Le Président Bazoum Mohamed ne manquera pas également de faire échec aux préjugés communautaristes en rassurant sur sa stature et sa capacité à banaliser le fait qu’un « nomade » « périphérique » issu par conséquent de « la marge » peut tout autant se préoccuper de la qualité des récoltes que de celle des pâturages. Les amis et les adversaires du nouveau président devraient lui laisser le temps de s’installer et de s'organiser avant de porter des jugements sur ses intentions quant à sa méthode et aux choix des hommes et des stratégies. Le Président Bazoum Mohamed aura également à rassurer sur l’exigence de tempérance qui devrait caractériser toute action à la tête de l’Etat.
Les défis sécuritaires et internationaux sont pressants et peut-être plus urgents à traiter que les considérations internes. Les deux axes prioritaires annoncés que constitueraient l'Education et la Sécurité paraissent en effet bien ciblés, néanmoins les exigences conjoncturelles les placent de fait sur des temporalités différentes. Le contexte du moment commande une priorité immédiate à l’amélioration des dispositifs sécuritaires tirant les leçons des récentes tragédies de Banibangou et Tillia.
Consolider les acquis des deux mandats du Président Mahamdou Issoufou et avancer dans un contexte fluctuant nécessitera à l'évidence de l'imagination et des adaptations qu’il conviendra de réévaluer constamment pour espérer des résultats à la hauteur des attentes. Il faudra pour cela avancer dans une dynamique renouvelée et revigorée afin d’insuffler un élan de nouveauté et d’espoir. Il sera probablement nécessaire de dépasser les inévitables conseils de complaisance qui éloignent parfois des véritables enjeux et réalités politiques du pays. Le Président Bazoum Mohamed sait que les qualités d’homme d’Etat s’acquièrent et s’entretiennent par un réalisme politique à la hauteur des aspirations du peuple et la construction d’une vision programmatique destinée à faire bouger les tendances lourdes du pays au service de son développement et de l’épanouissement des populations.
Abdoulahi ATTAYOUB
Consultant
Lyon le 12 avril 2021