Niger : Les failles et ambiguïtés du dispositif sécuritaire.
Niger : Les failles et ambiguïtés du dispositif sécuritaire.
La gravissime détérioration de la situation sécuritaire au Niger exige un impérieux sursaut national pour une mobilisation générale des consciences et des moyens afin de protéger les populations et leurs territoires. Assurer la sécurité des populations contre toutes les agressions quels qu'en soient les origines et les commanditaires. L'heure du renouveau dans l'engagement et la responsabilité a sonné afin de garantir une défense légitime, au service de la paix et de la stabilité, de l’espace traditionnel des communautés du Sahel. Le Niger a besoin aujourd’hui d’une convergence sans faille de l’ensemble de ses forces vives (politiques, société civile, FDS, ONG) afin de colmater les brèches qui pourraient être exploitées pour le déstabiliser davantage.
Mise en place d’un dispositif sécuritaire approprié
Il est temps de lancer un appel solennel à l’ensemble des Nigériens conscients de la gravité de la situation et des enjeux internationaux qui détermineront le nouvel ordre dans la bande sahélo-saharienne afin d’être à ce nouveau rendez-vous de l’Histoire et se montrer à la hauteur des aspirations des peuples et des promesses aux générations futures. Cette mobilisation devra se faire dans l'unité et la coordination afin d’en garantir le succès et démontrer son efficacité aux yeux des autorités du pays et de la Communauté internationale. La peur, le fatalisme, la résignation et l’incurie devront faire place à une reprise en main de la capacité à assumer l'héritage de ceux qui nous ont précédés et qui ont laissé la marque de leur détermination à faire de nos territoires un espace respecté, terre de paix, de prospérité et d'accueil.
Les précédents évènements à Diffa et les plus récents dans l’Azawagh nigérien (de Tillabéry à Tillia), ont mis en lumière des dysfonctionnements qu’il devient urgent de corriger afin de rationaliser les moyens dont dispose l’Etat et ses forces de sécurité pour permettre à ces dernières d’affronter l’ennemi dans des conditions optimales. Aucun doute ni suspicion ne devrait exister quant à la détermination des Forces armées nigériennes (FAN) à mettre tout en œuvre pour s’acquitter de leur mission régalienne sur l’ensemble du territoire national. Les différents corps qui combattent sur le terrain pour protéger les populations devraient disposer de la formation et des moyens adaptés au conflit actuel et à la hauteur de leur engagement à défendre le pays. Le contraire finira par créer une défiance vis à vis de l’Etat dans les zones les plus touchées par l’insécurité. La hiérarchie militaire et son commandement se doivent de se fixer comme premier objectif l’efficacité de leur engagement sur le terrain. Il est incompréhensible que les succès des combattants volontaires et des FDS, contre les groupes armés extrémistes, soient limités par l’absence de munitions ou de matériel adéquat alors que ces moyens sont par ailleurs disponibles.
Eveil des consciences pour un bien vivre ensemble
Au-delà des préoccupations sécuritaires du moment, qui appellent sans attendre l’union sacrée des citoyens, il convient de raffermir les liens séculaires entre les communautés pour mieux garantir la stabilité et la sécurité du pays. Ni l’Etat, ni la communauté internationale ne semblent en effet suffisamment outillés pour être en mesure de contenir les bouleversements qui se dessinent. Les projections les plus éclairées ne pourront prédire les conséquences et les configurations qui découleront de la crise actuelle au Sahel. Cet appel est destiné par conséquent aux communautés qui partagent cet espace afin de travailler dès à présent à l'édification d'un nouveau vivre ensemble dont l'organisation administrative et institutionnelle émane réellement de la volonté des populations. Le pays ne devrait pas se laisser surprendre par l’accélération de l’Histoire, les leçons de son voisinage immédiat pouvant à certains égards être utiles, avec naturellement tous les ajustements que nécessitent ses propres réalités. Rien n’est plus dangereux pour le pays qu’un déni des réalités , qui conduira irrémédiablement à un chaos semblable à celui que vivent certains pays voisins.
Le Niger est à un tournant historique qui lui offre l’occasion de se régénérer en s’appropriant tous les leviers possibles afin de se reconstruire sur la base de la volonté souveraine des différentes composantes de sa population. La cohésion nationale et l’intégrité du territoire ne peuvent reposer que sur un sentiment national porté par l’ensemble de nos communautés. Si l’Etat républicain ne parvient pas à considérer ses territoires de façon équitable, alors il court le risque de perdre en crédibilité. Il ne survivra que s’il est en mesure de contenir les manipulations partisanes qui l’instrumentalisent et le mettent au service d’intérêts particuliers.
Viendra ainsi le temps de la refondation d’un Etat enfin au service de ses citoyens, sans aucune catégorisation fondée sur l’appartenance ethnique. Il serait en effet incongru et vain de faire une fixation exclusive sur le rôle de la France si par ailleurs nous ne parvenons pas encore à admettre nos propres insuffisances quant à notre capacité à construire un projet national commun pouvant faire nation. Le pays gagnerait à ne plus se laisser distraire par des injonctions extrémistes destinées à le maintenir dans un ethnocentrisme suicidaire qui ne pourra que le conduire à une impasse existentielle.
La communauté internationale devrait poser un regard rénové et respectueux sur l'espace sahélo-saharien afin d'accompagner l'émergence d’une culture de responsabilité, gage d’une gouvernance consensuelle fondée sur la volonté et les intérêts des peuples. Les évènements actuels montrent à l’évidence que le système politique hérité de l’ancienne administration coloniale a échoué à construire des Etats dont les institutions soient suffisamment solides pour faire face aux nouvelles menaces qui risquent de conduire à leur dislocation. Au Niger, les élites doivent réfléchir à la reformulation d’un récit national réellement inclusif pouvant servir de socle à un pacte national traduisant les réalités nationales du pays et respectueux des liens séculaires forgés par l’Histoire entre nos communautés
Abdoulahi ATTAYOUB
Lyon (France )
16 12 2021
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